Je suis à la fenêtre et je regarde.
Les arbres penchent, les fenêntres sont fermées, une personne avec son caddie, une femme, la trentaine, rentre des oucrses.
Je la regarde qui marche. Elle me voit pas, je suis trop haut.
Je pense à cette fille qui m'a dit qu'elle avait rêvé de moi, le regard tueur. Est-ce que je ressemble vraiment à ce qu'elle voit, à l'image qu'elle a de moi ? Je ne veux pas, je ne veux pas qu'on me voit, ce n'est pas moi qu'on voit, ce n'est pas moi qu'on peut effleurer, qu'on touche, qu'on..
Ce n'est pas moi, moi je suis autre, regarde mon esprit, mon esprit n'a pas de forme, n'a pas de couleur, je suis trasparente, c'est ça dont il faut qu'elle se souvienne, pas de moi, ce corps.
Je ne veux pas qu'on me voit. Je ne me ressemble pas. Je ne me ressemble pas, je n'ai pas la même posture, pas la même façon de procéder. Je ne suis pas la même. Ce corps, tu le vois, ce corps, ce corps qui se modèle quand on veut, comme on veut, jamais assez bien, jamais assez à la hauteur de ce qu'on envisage. Voila la différence. Si j'aspire à quelque chose de grand mon corps sera ma limite. Il sera mon frein. Il sera un prétexte pour arrêter. Un prétexte pour Eux de m'arrêter. Un prétexte pour tous de ne pas avoir de but trop grand. Un prétexte pour être petit. Même grand parmi les petits, mais petit quand même. Limité. Handicapé alors.

Et je pense à cette histoire, ces mots : Personne ne sait à quoi je pense, on peut me regarder, personne ne sait à quoi je pense à ce moment précis.

Etant esprit on ne le saurait pas non plus, ce que je pense.

Je me dis que les question posées, et tous ces silences de ma part.

Je me souviens de cette fille, une fille modèle, qui un jour m'a demandé, concernant mon père : mais tu l'aimes ton pere, c'est ton père quand même. Tiens, donne-moi trois qualités de lui.
Et là j'ai bloqué. J'avais beau chercher, je voyais pas, mais rien du tout. Elle a pas attendu plus longtemps, elle a dit: il en a forcément ! ça vient de toi si t'en vois pas.
Elle m'a pas cru. Elle a pas cru mon silence. Alors je l'ai cru, moi, elle.
Culpabilité de parler. De silencer. De vivre. D'être comme ça, sans pouvoir rien changer.
D'être limitée. Par ça. Par ce qu'on voit, ce qu'on dit, ce qu'on entend, ce qu'on voit, ce corps, nos sens physiques. Mes sens.

Et ce sixième sens dont tout le monde parle, et ce mental qui serait puissant pour déclencher des cancers et les éliminer, un autre sens, celui de survie. Ceux-là on en parle mais on les voit pas, ce qui ne les empêche pas d'exister, de vivre, d'avoir du pouvoir.
Je ne voudrais garder que ça. Que ce qu'on en voit pas et qui est puissant. Qui contrôle la vie la mort.
Je voudrais contrôler ma vie et ma mort.
Je voudrais vivre, morte ou vivante. Avoir ce contrôle d'esprit, sur ce corps.
Un corps qui ne sert à rien, juste à garder l'esprit. Sans corps l'esprit n'existe plus, il lui faut une enveloppe. Voilà la condition. Condition à éviter. A enlever. A souffler.