La Douleur m'emporte avec le sourire jusqu'aux oreilles pour Eux, pour les Autres. Dedans je ne suis plus, j'ai honte de moi, de ce que je suis, représente pour Eux.
Je mets un voile chimique pour ralentir la téléportation dans l'Autre Monde, un voile de disgrâce, changements perpétuels de morosité, d'humour malsain, de moi tout simplement. Une fuite exagérée. Et douce, oh oui qu'elle est douce. Un peu trop à mon goût, pas assez rapide, c'est comme si je faisais un saut du pont avec une machine qui ralentit la chute, et j'y suis enchaînée corps et âme, je ne vois plus rien, je suis troublée, déroutée, Je refuse qu'on me touche, je serais sale, un peu plus tous les jours, à force de frôler ces gens, ce trop plein de gens dans les rues, métros etc, je suis allergique à Eux, je me refuse de partager ma peau avec Eux, ils sont sales, ou bien c'est moi qui suis périmée, champignionnée de partout, vers et autres insectes post mortem sont en moi, je suis la Sauvage à mille visages, à mille expressions et sentiments différents en une minute ; mais ça, peu de Nous le comprendrons, cette quête vers la pureté, cet éloignement marginal et incivilisé, je ne veux pas qu'on me touche, ni la main ni l'épaule ni ailleurs, je tremble de peur à l'idée de toucher, frôler un sac, un vêtement, une main. Je veux qu'on me regarde transparente et que rien ne vit autour, que les mouches, moustiques et autres insectes meurent à mon passage, à mon odeur, je veux que les Gens s'éloignent de moi, je suis le péché immonde à trois têtes de rasoir, je voudrais être Vent ou brouillard, nuage calme, impossible à attraper, je fuis, la force du vent est mon Amie.

Chimie, je m'ennuie de toi, reviens dans mon Antre, dans mon gosier, héritage de l'est, de gens aussi imparfaits que des malades, des handicapés, et mords-moi, fais danser ton venin dans mes veines invisibles, bleutées, et je m'abime.

Je mensonge d'allergies aux Gens, à tous ceux qui sont mauvais, et le chiatre je le vois mauvais aussi, il fume, c'est pas beau, c'est pas classe de fumer, ça dérange, la fumée pénètre dans les orifices et impossible de ne plus respirer, impossible de s'étouffer, c'est comme mourir de faim devant une table de fête bien remplie, c'est tellement ... ironique ? normal ?

Je veux être saine d'esprit et de corps, je ne veux pas qu'on s'approche de moi, ils laisseront leurs empreintes microbiennes sur moi, et moi je me désinfecte à l'alcool sous la douche, je ponce les peaux mortes au caillou rugueux, jusqu'à en saigner dix litres par minutes ; je voudrais nager dans la nappe de pétrole, et y mourir d'étouffement, ou de noyade, sans crier gare, sans respirer l'air sale, sali par ces milliards d'humains nauséabonds.
Je veux être l'élite, celle qui sauvera le Monde aux yeux de je ne sais qui, j'exige de rester pure, je chasse tout hors de ma vue, de mon odorat, de mon toucher. Je ne touche plus, et j'en crève de Douleur, de Manque, de Vie, de sociabilité...

J'ai mal à ma Douleur, à mon ancienne Douceur, et je souris jusqu'aux oreilles, à pleines dents.
J'attends, j'attends, j'attends d'en finir, je me gratte à la pierre ponce, je n'ai plus confiance en personne, ils sont tous prévoyants, indisciplinés, et mauvaise langue.
Je suis creuse, je suis vide, je ne veux rien, je n'ai besoin de rien, je ne sais pas comment on fait pour vivre, et ça ne m'intéresse plus.